Le Chant des Cavalières, Jeanne Mariem Corrèze

Il y a de cela plusieurs décennies, le Royaume de Sabès a vaincu son voisin, le Royaume de Sarda, et a profité de sa position de force pour lui imposer un traité de paix. Certains jugent ce dernier humiliant et attendent impatiemment le moment de s’en défaire. C’est notamment le cas des cavalières de Nordeau. Si cette communauté s’apparente à un ordre religieux, elle n’en est pas moins composée de femmes chevauchant des dragons et n’attendant que de reprendre les armes. Acquilon puis Éliane, Matriarches de Nordeau, espèrent trouver en Sophie Pendragon, jeune novice, l’élue qui les aidera à réunir des alliés et à se défaire de la domination de Sabès.

Jeanne Marième Corrèze nous emmène dans son univers en douceur. Elle distille ses caractéristiques (de ses usages à sa hiérarchie en passant par son Histoire) petit à petit sans que cela ne nuise à la compréhension du récit. L’histoire évolue dans une société matriarcale. La communauté des cavalières est constituée de femmes, jusqu’aux postes de pouvoir, et ce n’est pas une exception : rares sont les hommes haut placés. Aussi, leur divinité est une déesse et le féminin l’emporte sur le masculin. Les Matriarches dirigent donc leur Ordre et vivent en liens étroits avec la nature. C’est à Nordeau, au nord du Royaume, que prend place l’essentiel du roman ou au moins la naissance du soulèvement de Sarda. Acquilon puis Éliane de Nordeau travaillent et complotent pour arriver à leurs fins. Elles rêvent de redonner à leur Royaume sa gloire perdue quand d’autres espèrent la naissance d’une République. C’est dans ce contexte, instable, que nous rencontrons Sophie Pendragon, une jeune novice qui deviendra l’écuyère d’Éliane mais aussi celle dont dépend le destin des Cavalières. Sophie semble passive et, si elle se laisse souvent guider par sa colère, elle fait rarement des éclats. Elle suit son destin, est aisément manipulable mais tente, parfois, de suivre sa propre voie et de se rebeller. Il lui est difficile d’évoluer au côté d’Éliane, une matriarche froide et distante, plus concentrée sur ses propres objectifs que sur la formation de son écuyère. En réalité, il est difficile pour Sophie de se défaire des étiquettes qu’on lui impose : elle est l’élue, elle est celle qui influencera le destin, elle est un objet, un pion qu’on déplace, qu’on utilise à sa guise. Elle passe de mains en mains et n’est autre qu’une victime des manipulations politiques qui se jouent autour d’elle.

L’autrice n’a usé que de 300 pages pour nous offrir un univers à la fois riche et cohérent. On navigue entre intrigues, manigances et quête de soi. Ce roman est surprenant, passionnant et bien très écrit mais on aimerait en (s)avoir plus encore. Un livre unique est sans doute suffisant mais il aurait mérité quelques pages supplémentaires pour développer, peut-être, les reliques, les Reines (et notamment Maude) ou encore la relation entre Éliane et le Prince. J’aurais aimé, aussi, connaître un peu plus Frêne, herboriste de Nordeau. Je garderais néanmoins un bon souvenir de ce récit, et je me demande si ce premier roman ne signe pas le début des aventures de Sophie Pendragon.


Le Chant des Cavalières, Jeanne Mariem Corrèze,
Editions Les moutons électriques, 21 février 2020,
320 pages,
21,00€

 

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