Les Clameurs de la Ronde, Arthur Yasmine

Je ne crois pas avoir un jour parlé de poésie ici. En fait, j’en suis même certaine. Bien sûr, nous retrouvons de la poésie dans les romans, mais il n’a jamais été question de poésie en tant que genre littéraire, quelle que soit sa forme. Pourtant, j’en lis. Je lis, je relis, et lis encore Baudelaire. Je m’essaie à Rimbaud. Je lis Emily Dickinson, Emily Brontë, Victor Hugo, Apollinaire, etc. Parfois c’est le coup de foudre, c’est comme une révélation. Parfois c’est un échec. Je lis donc de la poésie. Pas beaucoup, pas souvent, mais j’en lis. En général, il s’agit de poètes classiques. Pourtant, aujourd’hui, je vais essayer de vous parler des Clameurs de la Ronde d’Arthur Yasmine, poète français vivant. Ce court recueil n’a rien de classique, si ce n’est ses références, ces poètes qui l’ont inspiré et ne cessent de l’inspirer. Inaugurons donc la catégorie Poésie.

Les Clameurs de la Ronde, court recueil, présentent sept années d’écriture. Il s’agit là d’amour (Que serait la poésie sans l’amour et ses affres ?), passionné et passionnant, mais pas seulement. Arthur Yasmine nous parle aussi de poésie, de jeunesse, de société occidentale, de mots et de maux. Il exprime son désespoir face au déclin de la poésie, face à la promotion d’une « poésie de niaiseries réflexives et de bafouillis mélancoliques, une poésie de gouaille populaire factice ou de scories universitaires ». Mais la poésie d’Arthur Yasmine se démarque-t-elle de cette poésie passive et médiocre qu’il dénonce ? Oui, sans doute.

L’écriture d’Arthur Yasmine, poète français vivant et quelque peu arrogant – il faut l’avouer -, a quelque chose d’épileptique. Elle est fragmentée et variée. On sent l’urgence à chaque instant. Entre sonnet, calligramme, échange épistolaire, rimes, Arthur Yasmine parvient néanmoins à s’émanciper de toute contrainte poétique. Le poète est révolté, en colère et interpelle sans cesse le lecteur. Il se fait tantôt agressif et violent, tantôt doux, sensible et sensuel. Sa plume est acérée. Le rythme est souvent effréné, mais parfois empreint d’une certaine lenteur. Il joue et se délecte de son jeu, de ses mots qu’il ne mâche pas, même s’il doit paraître arrogant – ce qu’il est sans nul doute mais qu’on lui pardonne pourtant. Ce qui m’a le plus plu, c’est la richesse de son vocabulaire qui contraste avec la violence qu’il n’a pas peur de glisser dans ses textes.

Avec Les Clameurs de la Ronde, chaque mot est accessible à chacun. On se laisse aisément emporter par ces mots, ces vers. Arthur Yasmine mêle violence et sensibilité. Il fait jaillir « la parole comme un poignard » et nous propose de découvrir et de lire son âme, passionnée.

Je remercie Arthur Yasmine pour son invitation cette une plongée dans sa poésie, pour l’envoi de son livre.

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Les Clameurs de la Ronde« Sortir la Poésie du marasme et lui redonner sa majesté perdue », c’est ce qu’il répète au sujet de son livre. Poète, Arthur Yasmine hérite en effet de la profonde coupure qui s’est opérée, au fil du XXe siècle, entre son art et le reste du groupe social. Pour affronter le désœuvrement général qui nourrit ce péril, il invoque la nécessité de mettre en œuvre une parole lucide et un combat intransigeant.

En 2013, il fixe ainsi le projet de composer un livre usant des différentes traces laissées durant les dernières années de son adolescence. Il est alors repéré par Stéphane Zagdanski, écrivain français subversif, qui décide de l’encourager en publiant ses premiers brouillons dans Paroles des jours.

Livre dramatique sur l’Action, l’Amour et la Poésie, Les Clameurs de la Ronde est le premier ouvrage publié d’Arthur Yasmine.

Editions : Carnet d’Art Date de parution : mai 2015 ♦ Nombre de pages : 85 p. ♦ Prix : 9,00€

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10443008_1499152317032541_4934229571579925951_oArthur Yasmine est né à Paris au début des années 90. On dit qu’il a choisi la Poésie après avoir tenté de l’abandonner brutalement. C’est au cours d’une profonde rupture, entre 2011 et 2013, qu’il comprit sa vocation. Il aurait marqué son choix en piétinant les formations scolaires et les situations professionnelles qui servent habituellement de légitimité aux écrivains contemporains. À ce jour, il continue de se mettre face aux mots, sans avancer d’autre explication. Les Clameurs de la Ronde est le premier ouvrage publié d’Arthur Yasmine. (Source)

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Invocation à la jeune morte

À la tremblante, la convulsée…
Tant embrassée, l’épileptique… combien t’ont laissée morte ?…
Combien t’ont enterrée ?…
À la fauve…
À l’affamée qui se débat dans son caveau…
À son vacarme de mourante…
Aux fureurs qui frappent son tombeau…
De toi mendiante, combien croyaient jurer l’ailleurs ?…
Combien pensaient que tu les sauverais ?…
À la singulière, la marginale…
On t’a craché dans la bouche et l’on t’a délaissée…
Poésie! Poésie!
J’envoie nos clameurs chérir ton cadavre…
Dans l’ennui et la rage, qu’il nous fasse danser…
J’envoie chercher ton cadavre…
Pour la force et le soleil, qu’il nous fasse chanter…

Mars 2013.

6 commentaires sur « Les Clameurs de la Ronde, Arthur Yasmine »

  1. Invocation à la jeune morte est très beau. J’ai beaucoup aimé aussi l’extrait de la Lettre sur l’animalité. Un auteur qui se démène pour défendre son art.

  2. Nous avons le même avis on dirait ! Je suis contente que tu l’aies aimé, sincèrement.
    C’est rafraîchissant qu’il y ait des personnes comme lui qui se démènent pour leur poésie !

    1. Oui, bien que pour moi il ne s’agisse pas d’un coup de coeur. Ça fait du bien de voir qu’il y a encore des personnes qui défendent la poésie, d’autant plus qu’il est jeune. C’est tellement rare…

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